PLONGÉE AU CREUX DE NOS ÉMOTIONS ET DE LA DANSE EXPRESSIONNISTE
ECCE (H)OMO de Paula Pi
Vanité « Eitelkeit », désir
« Beigierde », peur « Angst », haine « Hass » et amour « Liebe », Paula Pi danse les Affectos Humanos de Dore Hoyer, danseuse expressionniste oubliée.
Sur un plateau épuré et immaculé ces émotions universelles imprègnent son
corps. Il se désaxe, s’étend et se tord. Flamenco et danse indienne, souvenirs
des voyages de Dore Hoyer, se mélangent à la danse expressionniste. Elle s’arche
dans des directions opposées, ses yeux s’écarquillent, ses doigts tremblent. Le
bassin roule, des dissociations et isolations entre buste et hanches se créent.
Flux, poids, dynamiques se transforment au cours des cycles. Tout comme son
genre : au début femme elle se pose une moustache, figure un homme et se
sent plus à l’aise pour danser. Le public étonné et captivé assite à toutes ces
métamorphoses de corps entre une danse expressionniste peu courante dans les
théâtres et des changements de personnages très maîtrisés.
Au sein de cette danse, la mémoire, le geste et l’archive se croisent. Avec subtilité et dans un corps androgyne Paula Pi superpose Dore Hoyer, Martin Narbhar, une journaliste et elle-même. Les voix, les langues et les époques s’entremêlent. Elle présente une réincarnation d'Affectos Humanos entre conférence, chorégraphie et documentaire. Elle questionne les archives fragiles et leur redonne vie.« Travailler sur l’œuvre de quelqu’un d’autre, c’est un geste pour essayer d’en sortir. C’est aussi un geste pour se dégager de l’idée de l’auteur, de l’originalité, de la surpuissance du chorégraphe. J’ai envie de croire que les œuvres qu’on produit ne nous appartiennent pas, et de défaire l’image de l’artiste qui construit une œuvre à partir de rien »Citation provenant d’un entretient de Paula Pi avec François Maurisse Publié le 11/06/2017 http://maculture.fr/entretien/paula-pi-ecce-homo/
Dore Hoyer ( 1911– 1967 ) est une danseuse et chorégraphe expressionniste
allemande. Elle est l’une des plus importantes danseuses solistes de la
Ausdruckstanz tradition. Elle a beaucoup été inspirée par le travail de Mary
Wigman. Avec le groupe dirigé par cette dernière elle tourne dans de nombreux
pays. Pendant la seconde guerre mondiale elle performe à de nombreuses reprises
en Autriche. Elle reprend l’école de Mary Wigan à Dresde qui prend le nom de
D. Hoyer Studio. Puis, elle devient la directrice du ballet de l’Opéra
d’Hambourg pendant 3 ans avant de poursuivre sa propre carrière de soliste.
Sachant qu’elle ne pourrait bientôt plus danser, elle se suicide à Berlin et
dans une des dernières lettres qu’elle a écrites, elle se lamente : « C’est
seulement par la danse que je communique ».
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